L’Europe est l’Homme malade du monde

mai 2, 2010 0 Par Michel Santi

Trente milliards ou cent milliards n’y changeront rien car le ver est dans le fruit et les investisseurs du monde entier devraient s’attendre à un dénouement catastrophique de la tragi-comédie Européenne qui se joue sous nos yeux! Peut-on encore parler et employer le terme de “sauvetage” alors que tout ce qui a été jusque là tenté par les autorités Européennes a été mal conçu, mal géré, mal communiqué, bref a été marqué du sceau d’un amateurisme inqualifiable ayant progressivement asséché la confiance en la Zone Euro.

Savez-vous que le Portugal – dont la notation internationale vient d’être dégradée – devra ainsi aux termes des savantes combinaisons (ou combines?) Européennes prêter à la Grèce 774 millions d’Euros sur 3 ans à un taux de 5% alors que lui-même se refinance sur les marchés à … 5.6%? Les marchés spéculatifs eux-mêmes y regardant aujourd’hui de beaucoup plus près dès lors qu’il s’agit de prêter à la Grèce puisque le bon grec à 2 ans est vendu à 75% de sa valeur démontrant effectivement que même les parieurs internationaux escomptent ne récupérer que 75% de leurs placements grecs… Dans un contexte o๠il est quasiment sà»r que les dizaines et les centaines de milliards prodigués aujourd’hui à la Grèce tourneront la tête à des marchés trop heureux de s’attaquer au prochain pigeon (Portugal ou Espagne), ne vaudrait-il pas mieux laisser la Grèce faire faillite et pouvoir ainsi redresser son économie (et ses finances) par une dévaluation massive de sa monnaie tout en punissant des spéculateurs trop heureux de festoyer sur les restes de sa dépouille?

En dépit des comparaisons certes tentantes effectuées ces dernières semaines entre la déroute grecque et la faillite de Lehman Brothers, ces situations sont pourtant fort divergentes, en tout cas du point de vue qualitatif: Les autorités Américaines avaient autorisé la plus grosse faillite de l’Histoire de leur pays afin d’offrir un sacrifice expiatoire à des marchés o๠la notion de “moral hazard” s’était terriblement diluée… Quelle leçon magistrale fut ainsi infligée aux marchés, aux spéculateurs et à la corporation des Banquiers prêts à tous les risques car persuadés que le sauvetage par l’Etat était un acquis! Et quelle différence avec l’attitude actuelle des dirigeants de l’Europe qui, loin d’un Darwinisme financier indispensable quoique bien-sà»r douloureux, en sont toujours à l’épisode du sauvetage (inutile) de Bear Stearns qui fut, en Mars 2008, une mise en bouche ou une répétition générale avant le drame de l’automne suivant!

En réalité, l’analogie avec les maladresses du sauvetage de Citigroup par le Gouvernement US serait nettement plus appropriée. La Trésorerie Fédérale n’avait-elle pas effectivement et par trois fois recapitalisé cet établissement entre 2008 et 2009 tant et si bien qu’elle avait fini par en être le propriétaire? Pour autant, ce qui se révèle aujourd’hui être une affaire fructueuse pour le contribuable Américain qui revend avec bénéfices ses participations dans Citigroup risque de tourner en une opération calamiteuse pour l’Union Européenne qui, au final, devra débourser des sommes plus proches du plan TARP Américain (700 milliards de dollars!) si elle prétend tirer d’affaire certains pays du Club Med Européen… En fait, les subsides de 100 milliards d’Euros accordés à la Grèce dans le cadre de ses dernières déclarations d’intention en date autoriseront l’Union à posséder virtuellement la moitié du P.I.B. de ce pays!

Est-ce là le grand projet Européen que nombre d’Euro-enthousiastes (dont je faisais partie) avions appelé de nos voeux? La réalité est que cette Europe ne fait plus rêver et pour cause du reste puisqu’elle n’offre plus qu’une croissance misérable à ses citoyens qui devront se contenter d’un maigre 1% cette année alors que (selon le F.M.I.) la croissance mondiale sera de plus de 4%. Le Japon lui-même fera mieux que nous en 2010…

Que font nos politiques et comment nos autorités nationales et Européennes réagissent-elles pendant ce temps? Ils blâment des agences de notation accusées d’aggraver la crise: Il est vrai qu’il est tellement plus facile et opportuniste de tirer sur le messager que de remettre en cause les dogmatistes Keynésiens accrochés à leurs certitudes selon lesquelles les ennuis grecs se résument à des problématiques de liquidités qui seront solutionnées par des apports en liquidités… Ne soyons donc pas choqués par les prochaines dégradations de notation de pays Européens, inévitables du fait d’une croissance condamnée à rester mièvre à cause d’un modèle Européen structurellement déficient.

L’expérience réjouissante du lancement de l’Euro et de l’Union Monétaire de ces dix dernières années a vécu en dévoilant aujourd’hui ses points les plus vulnérables. Alors que les Etats-Unis croissent à un rythme dépassant les 3% et que les pays émergents s’enrichissent selon des proportions encore supérieures, l’Europe est l’Homme malade du monde.

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